Implication de la polyploïdie dans l'adaptation des agrumes au déficit hydrique et caractérisation génétique de populations de porte-greffes hybrides tétraploïdes

Présentation par Lény Calvez, UMR Agap Institut, équipe SEAPAG, Guadeloupe, jeudi 24 novembre 2022

Résumé

L’agrumiculture représente la première production fruitière mondiale. Cette industrie est soumise à de nombreuses contraintes environnementales qui affectent fortement le développement des arbres, le rendement et la qualité des fruits. Les agrumes tolèrent très peu les climats froids et sont donc cultivés dans les zones tropicales et subtropicales. Avec le changement climatique, ces zones sont soumises à une augmentation et une intensification des épisodes de sécheresses. L’utilisation de porte-greffes est essentielle en agrumiculture, elle confère une tolérance, voire une résistance aux maladies, aux ravageurs et aux contraintes pédoclimatiques. Durant ces dernières années, les programmes d’amélioration des agrumes ont porté un intérêt plus particulier sur la polyploïdie, celle-ci améliorant l’adaptation des porte-greffes aux contraintes environnementales.

Ce travail de thèse a pour objectif d’identifier les déterminants physiologiques et moléculaires impliqués dans la tolérance des polyploïdes au déficit hydrique et de caractériser génétiquement deux nouvelles populations de porte-greffes hybrides tétraploïdes pour la sélection de nouveaux génotypes mieux adaptés aux contraintes actuelles de l’agrumiculture.
Dans un premier volet, nous avons examiné la réponse au déficit hydrique de quatre combinaisons de scions et de porte-greffes avec différents niveaux de ploïdie : le limettier Mexicain diploïde (2x) (Citrus aurantiifolia (Christm.) Swing.) et le limettier Tahiti triploïde (3x) (C. latifolia Tan) ont été greffés sur des porte-greffes citrumelo diploïdes et tétraploïdes (4x) (C. paradisi Macf. × Poncirus trifoliata (L.) Raf.). Afin de caractériser les traits de tolérance au déficit hydrique, des études physiologiques, hormonales, biochimiques et transcriptomiques ont été réalisées. Ces analyses ont permis de mettre en évidence une meilleure adaptation des porte-greffes 4x vis-à-vis du déficit hydrique lorsqu’ils sont cultivés en pot.

Dans un second volet, nous avons généré deux populations de porte-greffes hybrides 4x : une population de 125 individus issue de l'hybridation entre les porte-greffes volkameriana 4x (C. reticulata Blanco x C. medica L.) et citrumelo 4x (C. paradisi x P. trifoliata) et une population de 58 individus issue du croisement entre le volkameriana 4x et le citrandarin 4x (C. reticulata x P. trifoliata). Un génotypage des hybrides par la méthodologie KASPar a permis d’établir une carte génétique du citrumelo et une analyse du comportement méiotique du citrumelo et du citrandarin. Un faible taux de recombinaison a été observé et s’explique par un appariement chromosomique préférentiel élevé se traduisant par une ségrégation intermédiaire à tendance disomique. Ce type de ségrégation, permet la transmission à la descendance d’une grande part de la valeur génétique des porte-greffes intergénériques d'origines.

Dans un troisième et dernier volet, une caractérisation génétique plus fine a été réalisée à partir de données GBS de 103 hybrides de la population de porte-greffes tétraploïdes volkameriana x citrumelo. Deux cartes génétiques de haute densité ont été générées. L’analyse complète du fonctionnement méiotique des deux géniteurs a mis en évidence une ségrégation intermédiaire à tendance disomique pour le citrumelo et un comportement méiotique plus complexe pour le volkameriana avec un mélange de profil de ségrégation. L’héritabilité de gènes d’intérêts impliqués dans la tolérance au HLB et la résistance au CTV et aux nématodes a été étudiée au sein de la population. Pour finir, un phénotypage du développement racinaire a été réalisé afin d’évaluer les capacités d’enracinement de chaque hybride en vue de sélectionner des porte-greffes plus tolérant au déficit hydrique. Enfin, les données de phénotypage ont été couplées aux données GBS dans le but d’effectuer une étude d’association génétique pour identifier des QTL impliqués dans le développement et l’élongation racinaire.

Publiée : 24/11/2022